08 février 2022
Opération Nautile
Les conditions permettent enfin au sous-marin de reprendre ses interventions. Olivier, Frank et Carl ont une longue journée devant eux!
La mission du jour est de déplacer les infrastructures du fond sur leur point cible; de les débarrasser de leur patte d’oie (sangle d’immersion) et de dérouler les câbles nécessaires aux branchements grâce aux bras électroniques du Nautile. Les pilotes sont aujourd’hui accompagnés de Carl, ingénieur en recherche au CNRS. Etant à l’origine de la conception technique des appareils du fond, c’est lui qui les connait le mieux !
Je vous propose de suivre le déploiement du Nautile étape par étape…
Crédit photo :Céline Rommevaux
Le Nautile ne part jamais seul
La mise à l’eau du sous-marin se fait grâce à la lift-line, la ligne qui porte délicatement l’engin jusqu’à la surface.
Mais que fait le plongeur sur le toit du Nautile ? Aujourd’hui, c’est Heinrich qui est assigné à cette position, et il permet d’enclancher la première étape de détachement du Nautile!
Lorsque le Nautile est dans l’eau, le plongeur décroche la lift-line. Le sous-marin reste attaché au navire par le câble que l’on voit sur la photo à l’avant de l’appareil – dit le treuil ou l’axial. Il fait office de dernier lien avec le sous-marin et permet de le maintienir dans l’axe du bateau. Le plongeur met ensuite en marche la balise de localisation du Nautile située à l’avant de l’appareil – dite Gonio. Cela servira à l’équipe en surface de localiser le sous-marin dans l’eau. Puis, après intervention de deux plongeurs bouteille, il récupère la patte d’oie bleue qui raccroche l’axial au Nautile.
Il faut être vif et préparé. Les actions s’enchaînent vite dans une stabilité difficile à maintenir face à un engin de 19 tonnes dans la houle.
Crédit photo : Nicolas Fromont – @nicolasfromontphoto
Les plongeurs
En parallèle intervient une équipe sur l’eau : elle assure la deuxième étape de détachement du Nautile. Leur bateau se place toujours sur la droite du Nautile et envoie deux plongeurs bouteille qui doivent décrocher l’axial et la patte d’oie (en bleu sur la photo précédente). Lorsque la patte d’oie est retirée, elle est donnée au plongeur sur le toit de l’appareil. La coordination entre eux est extrêmement précise, ils sont tous les trois soumis aux mêmes risques.
Les plongeurs bouteille font un tour du Nautile sous l’eau pour s’assurer que tout soit correctement en place avant son immersion. Ils sont tous récupérés par le bateau et retournent à bord du Pourquoi Pas ?.
On peut saluer cette chorégraphie technique extrêmement précise qui permet au Nautile de plonger en sécurité!
Crédit photo : Nicolas Fromont – @nicolasfromontphoto
Retour à bord
L’équipe retourne à bord du Navire grâce à une échelle suspendue, et le bateau est remonté en dernier à l’aide de la ligne qui sert à envoyer les appareils au fond !
Crédit photo : Nicolas Fromont – @nicolasfromontphoto
Mise à l’eau de la Biocam
Ce soir, c’est au tour de la Biocam de rejoindre le site EMSO-LO à 2400m de profondeur. C’est un appareil développé par l’Institut national de physique nucléaire et de physique des particules qui est destiné à capturer des images de bioluminescence. Il est équipé de deux caméras intelligentes dont la particularité est de pouvoir reconstruire les organismes bioluminescents obsérvés en trois dimensions. Ces données viendront compléter les images faites par la caméra hypersensible de BathyBot. Les chercheurs espèrent ainsi être en mesure d’associer les différentes formes de bioluminescence à des familles d’organismes. Comprendre la bioluminescence pour identifier les espèces, c’est le rêve de nombreux scientifiques!
Du zooplancton à bord!
Marthe s’intéresse à la bioluminescence du planton qu’elle ramasse grâce à un filet; et aujourd’hui plusieurs espèces animales se sont prêtées à une séance photo !
L’organisme en haut à gauche appartient à la famille des gastéropodes, c’est un ptéropode. Ce mot d’origine grecque veut dire « aux pieds ailés ». On peut effectivement remarquer deux structures semblables à des ailes, qui sont en réalité les pieds de ce gastéropode. Lorsqu’il est en mouvement, il peut faire penser à un papillon. Après tout, c’est le même principe de locomotion, mais dans un milieu différent.
L’organisme en bas à droite est un copépode. Il appartient à la famille des crustacés, qui possèdent un squelette externe; contrairement au ptéropode qui est un mollusque, au corps mou.
Le zooplancton est un élément important dans le cycle de la vie. Il est le premier maillon de la chaîne alimentaire et assure le transfert du dioxyde de carbone atmosphérique de la surface jusqu’à la croûte océanique. Le réchauffement climatique n’est pas sans effet sur ces populations…
Prenons l’exemple du ptéropode décrit précédemment qui appartient à la famille des gastéropodes dont de nombreuses espèces possèdent une coquille. Il en va de même pour les espèces planctoniques qui en développent également une. Malheureusement, l’océan connait une acidification qui fragilise cette coquille et ralentit leur croissance. L’acidification de l’eau s’explique par l’augmentation du dioxyde de carbone atmosphérique dont la dissolution augmente dans les océans. Ce phénomène diminue le pH de l’eau, le rendant plus acide. Les espèces planctoniques à coquille, qui participent à la séquestration du carbone par les fonds océaniques, sont aujourd’hui menacées par la dissolution du dioxyde de carbone dans l’eau. Un triste comble.
Crédit photo : Marthe Vienne